Le renard

Le renard roux (Vulpes vulpes).

Tout le monde connait ce canidé (ensemble des chiens, loups et autres … renards). De couleur brune à rousse avec le poitrail blanc, la queue longue et épaisse, le museau fin, les oreilles dressées, le corps long monté sur des pattes courtes. Sa réputation transparait dans les contes de notre enfance : malin, chapardeur, insaisissable, prudent, finaud, il est l’animal de toutes les ruses. Et pourtant, il ne doit sa survie que parce qu’il est prolifique et opportuniste.

Parce qu’il n’a pas la vie facile, notre goupil (nom qu’il porta durant des siècles et issu du gallo romain ; déformation de vulpes en latin- gulpes-gulpis-goupil). L’espérance de vie d’un adulte est de 3 à 5 ans dans la nature, alors qu’elle est de 14 ans en captivité ; 80% des renardeaux meurent dans leur première année. Carnassier de taille moyenne, il a du survivre à la prédation des grands carnivores (loup et lynx) avant que l’homme n’élimine ces derniers et s’érige en grand protecteur des poulaillers. Survivre à la chasse intensive aussi, en tant que « nuisible » et pour son beau pelage. Puis dans les années 1960 en Europe occidentale s’étend la rage vulpine. En provenance de Pologne, la maladie se servit de notre sujet aventureux comme vecteur de son développement. Il faudra attendre les années 1990 pour que les instances politiques de France, d’Allemagne, des Pays-Bas et de Belgique sous l’impulsion de la Suisse organisent des campagnes de vaccination concertées pour que la maladie disparaisse de nos régions (la chasse, le piégeage et le gazage des terriers sont restés sans effets sur la maladie et les populations de renards ; par contre, les blaireaux, qui partagent leurs terriers avec les renards et sont – eux – des animaux purement nocturnes, ont failli disparaître puisque le gazage s’effectuait de jour...). Au risque de diminuer le capital de sympathie dont jouit aujourd’hui le renard, nous devons signaler qu’il est aussi vecteur du ténia du renard (Echinococcus multilocularis) ; le contact avec des fruits souillés par l’urine ou les excréments du renard peut transmettre l’infection à l’homme : le foie est attaqué et l’infection peut aller jusqu’à la mort de l’individu touché (songez-y avant de cueillir des mûres tout près du sol...)

Très prolifique. La femelle porte quatre à six petits chaque année (parfois plus si les conditions le permettent mais il a été constaté que la fécondité diminuait en cas de surpopulation, si bien que l’on peut parler d’autorégulation). Le renard passera le printemps et l’été en couple, la femelle n’est féconde que quelques jours en février (ou mars) et mettra bas 52 jours après la saillie. Elle s’occupe seule des petits durant l’allaitement (9 semaines) mais durant cette période, le mâle nourrit toute la famille en déposant les repas à proximité du terrier dans lequel il n’est pas admis !   En automne, les petits partiront en  quête de nouveaux territoires et atteindront leur maturité sexuelle le même hiver (à 10 mois). L’éclatement de la cellule familiale en automne explique la grande mobilité de la population (et des maladies que l’animal transporte).

Très opportuniste, ce mammifère qualifié de carnivore se nourrit bien sûr de micromammifères tels que lapins, souris et campagnols (en ce sens, il est très utile à leur régulation), mais il est en fait omnivore : il complètera volontiers son régime alimentaire de limaces, vers de terre, insectes rampants, animaux morts, mais aussi de fruits, champignons, légumes et, pour faire bonne mesure, de déchets chapardés dans les poubelles. Bien sûr, les propriétaires de poulaillers savent qu’il faut se prémunir de sa gourmandise, mais en ville, c’est une (pré)occupation mineure. Il chasse seul, essentiellement à l’affut, a une vue plutôt médiocre mais un odorat très fin et une ouïe particulièrement sensible. Comme le chat, il pratique le mulotage : approche lente et silencieuse, puis un bond en l’air pour retomber sur sa proie. Le renard est un animal territorial qui marque son territoire olfactivement (urine) et visuellement (crottes qu’il expose bien en évidence au regard de ses congénères – et des naturalistes...).

Sa capacité d’adaptation est un atout majeur, si bien qu’on peut le rencontrer dans tous les milieux : forestiers, bocagers, agricoles et semi urbains, dans tout l’hémisphère nord et même en Australie où il a été introduit (très malheureusement) pour limiter la propagation du lapin (aussi introduit très malheureusement). Il bénéficierait même du réchauffement climatique pour étendre son aire de répartition vers le nord au détriment du renard polaire plus petit. Aujourd’hui, la population de renards roux de nos régions est abondante et cet animal particulièrement adaptable s’invite dans nos parcs et terrains vagues citadins. Avec de la chance, vous pourriez le voir chasser au Scheutbos, bien qu’il ne se reproduise pas sur place. Voilà donc un très bel animal que nos enfants et petits-enfants devraient pouvoir encore rencontrer, et c’est une bonne nouvelle.

JP