Les odonates

Si vous avez un jour tenté maladroitement de prendre une libellule en mains, elle vous aura sans doute mordu jusqu’au sang : vous aurez soudainement réalisé pourquoi les entomologues ont baptisé ces insectes « odonates » (du grec odontos, dent). Bien sûr, les odonates n’ont pas de dents, mais des mandibules puissantes et acérées.


Il y a deux sous-ordres d’odonates : les demoiselles, qui joignent leurs ailes au-dessus de leur abdomen au repos, et les libellules, qui étalent leurs ailes horizontalement au repos. Si vous voulez entrer à l’académie des sciences, vous parlerez plutôt de zygoptères (« ailes jointes ») et d’anisoptères (« ailes différentes ») ; mais vous serez le seul… Sans doute pour se donner un genre à part, les Lestes sont des demoiselles indisciplinées qui étalent leurs ailes en V, rien que pour nuire à ma présentation ; j’ai proposé qu’on les appelle zygotoptères, mais l’appellation n’a pas encore été adoptée par les milieux scientifiques (à mon grand dam, puisqu’il s’agit de demoiselles).

 

07 aeshna cyanea 3Aeshna cyanea - Aeshne bleue

 

 

 

07 pyrrhosoma nymphulaPyrrhosoma nymphula - Petite nymphe au corps de feu

 

 

07 lestes viridis 3Lestes viridis - Leste vert

On compare parfois le vol des odonates à celui des hélicoptères. Je trouve cette comparaison injurieuse. Pour les odonates, dont les performances en vol sont infiniment supérieures. Ce sont de véritables acrobates aériens, rapides et pouvant changer brusquement de direction, et même voler en arrière ! Leur secret ? Le découplage des ailes, qui peuvent battre indépendamment. Leur problème ? Un certain retard à l’allumage : comme de vieux diesels qui avaient besoin d’une résistance de préchauffage pour le démarrage, les odonates doivent préchauffer leur hémolymphe en exposant leurs ailes au soleil, pour qu’il devienne plus fluide et soit capable d’irriguer les grandes surfaces alaires (même problème pour les lépidoptères).

Les odonates ont de grands yeux globuleux qui leur confèrent une excellente vue. Vue, vol et mandibules en font des prédateurs très performants. Ce qui est sans doute à l’origine du nom anglais donné aux libellules : « dragonfly ».

On croit souvent que les odonates ne se trouvent que dans les milieux aquatiques. Or, on trouve fréquemment des adultes loin de toute mare ou tout ruisseau. En fait, les odonates ne sont inféodés aux milieux aquatiques que pour leur période de reproduction et leurs stades larvaires ; une fois la ponte terminée, les adultes partent chasser dans tous les milieux.

 

 

Voici le moment venu de vous parler du fameux coeur des libellules, au risque de devenir vraiment impopulaire parmi les plus romantiques d'entre vous. De quoi s'agit-il? Quand vient le moment de la reproduction, le mâle saisit brutalement la femelle derrière la tête, à l'aide de ses appendices terminaux appelés cercoïdes. La femelle (dont les appels « au vol, au vol » restent ignorés par la brute) recourbe alors son abdomen pour venir recueillir le sperme du mâle à la base de son abdomen, où se trouvent ses pièces copulatrices. De plus, chez beaucoup d’espèces, le goujat continue à maintenir la femelle derrière la tête, tout en volant au ras de l’eau où il semble décider lui-même de l’endroit idéal pour déposer les œufs (largués au hasard par les espèces les plus gaspilleuses, ou placés dans des fentes incisées par la femelle dans les tiges de plantes aquatiques). Les odonates ont encore un long chemin évolutif à parcourir pour arriver à un meilleur relationnel dans le couple…

07 coenagrion puella 3Le coeur des demoiselles (agrions jouvencelle)

Les larves resteront dans la mare pendant 1 an (les demoiselles) à 4 ans (les libellules) où elles passeront l’hiver en diapause, et subiront jusqu’à 9 mues successives. Puis, elles « émergent » de l’eau, grimpent sur la tige d’une plante et se métamorphosent en adultes : vous les verrez se tortiller pour sortir de leur dernière « peau » - l’exuvie – qu’elles laisseront solidement accrochée sur place. A noter que la métamorphose est incomplète, puisqu’il n’y a pas de réorganisation totale du corps comme chez les diptères et lépidoptères, par exemple.

07 larves demoisellesLarves de demoiselles

07 aeshna cyanea emergence 1Emergence d'une aeshne bleue, et exuvie

BACK to "les ordres d'insectes"     http://www.scheutbos.be/pages/dossiers/les-ordres-d-insectes/