Les lépidoptères

Vous commencez maintenant à connaître les entomologistes et leur manie d’utiliser des mots compliqués : en appelant les papillons des « lépidoptères », ils ont (pas) simplement voulu attirer votre attention sur la spécificité de cet ordre d’insectes, à savoir la présence d’écailles (lepidos en grec) sur leurs ailes. Des écailles qui leur donnent leurs merveilleux dessins et coloris, mais aussi une grande fragilité : ils perdent très facilement ces écailles, et c’est pourquoi il faut traiter ces bestioles avec délicatesse (utiliser si nécessaire un filet soyeux et bloquer très rapidement le mouvement des ailes pour éviter leur frottement sur la surface du filet). Les ailes étant constituées de deux membranes de chitine adossées l’une à l’autre, les écailles qui les recouvrent peuvent donner un aspect tout-à-fait différent aux deux faces.

Il y a deux grands sous-ordres de papillons : les rhopalocères et les hétérocères. Les rhopalocères ont des antennes à extrémité épaissie en massue, en club de golf ou en coton-tige (rhopalon, massue  et kéras, corne). Les hétérocères ont toutes sortes d’antennes (plumeuses, filiformes,…) mais pas de massue. Les rhopalocères sont communément appelés « papillons de jour », et volent effectivement exclusivement de jour. Par contre, tout papillon qui vole le jour n’est pas nécessairement un rhopalocère, puisque beaucoup d’espèces d’hétérocères volent également le jour ; les appeler « papillons de nuit » comme c’est l’usage entraîne donc une forte confusion. Et tant qu’on est dans les malentendus, il est faux de croire que tous les  papillons de nuit ont des couleurs ternes : certains sont magnifiquement colorés. On dénombre en Belgique (au Scheutbos) 104 (24) espèces de rhopalocères et 2240 (251) espèces d’hétérocères.

27 shargacucullia scrophulariae 2Shargacuculia scrophulariae
Cuculie des scrophulaires

Les lépidoptères subissent une métamorphose complète : le papillon adulte sortant de sa chrysalide n’a vraiment rien à voir avec la chenille dont il est issu. Les chenilles de papillons ternes arborent parfois des couleurs flamboyantes, et vice-versa. Les chenilles de papillons peuvent parfois être confondues avec les larves d’autres insectes, principalement des tenthrèdes (hyménoptères : voir page correspondante) ; pour s’assurer que l’on observe bien une chenille, il faut compter le nombre de paires de fausses pattes (moignons supports non articulés) : les chenilles en comptent 2 ou 5.

 

27 shargacucullia scrophulariae adulteShargacuculia scrophulariae
Cuculie des scrophulaires

Vous parler de toutes les familles de papillons présentes chez nous nous entraînerait trop loin, mais je ne peux résister à la poésie étymologique de certaines d’entre elles. D’abord les principales familles de rhopalocères :

Hesperiidae : selon les uns, leur nom viendrait des Hespérides, filles de la nuit, qui prennent soin à l’extrême ouest de la Méditerranée, d’un beau jardin de pommes d’or (probablement des oranges espagnoles…) qui évoquent la couleur orangée du dessus des ailes de certaines espèces de la famille ; selon les autres, leur nom viendrait du grec Hesperios (du soir), en rapport avec la couleur sombre du dessus des ailes d’une autre partie des membres de la famille ; simplifions : ailes sombres ou orangées, ce sont les couleurs du couchant. 

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Thymelicus sylvestris - Hespérie de la Houlque

Nymphalidae : aucune explication étymologique satisfaisante, mais il est nécessaire de mentionner cette famille qui contient beaucoup de rhopalocères communs et très colorés (Paon-du-Jour, Vulcain, Belle-Dame, Robert-le-Diable, Amaryllis,…) 


 

 

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Arashnia levana - Carte géographique

Pieridae : leurs tons clairs évoquent les tuniques des Muses, qui résidaient sur le Mont Pieros. 

 

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Pieris napi - Piéride du navet

Lycaenidae : tous les membres de cette famille ont de magnifiques yeux en amande, entourés d’un liseré blanc, qui rappellent les yeux du loup (Lycos, loup) ; ils comprennent tous les azurés, aux beaux tons bleus.

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Polyommatus icarus - Azuré de la bugrane

Ensuite quelques familles, super-familles et sous-familles d’hétérocères (oui, le vivant ne se laisse pas souvent imposer les limites étroites de nos critères de classification) :

Noctuidae : du latin nox, nuit ; cependant, les membres de cette famille très nombreuse ne volent pas tous  la nuit : certains effrontés volent de jour, comme le Gamma; ces papillons ont en général un corps robuste, et des ailes plus longues que larges ; au repos, ces ailes sont repliées vers l’arrière, à plat sur le dos ; ces papillons possèdent généralement la faculté de détecter les ultrasons des chauve-souris  qui les font entrer en convulsions en vol, provoquant un vol erratique qui leur permet souvent d’échapper à leurs prédateurs.

 

 

 

27 autographa gamma 98Autographa gamma

Pyralidae : du latin Pyra, bûcher ; ces papillons avaient la réputation d’aimer les feux ouverts, sans doute parce qu’ils s’y cachent de jour pour rechercher l’obscurité, ou qu’ils s’échappent du feu en quittant l’abri formé par l’écorce des bûches ; je préfère cependant le terme anglais de « snout moths » (papillons à museau) qui fait référence à l’aspect caractéristique de leurs organes buccaux, à l’avant de leur tête ; leurs ailes au repos sont souvent enroulées sur leur dos ; une sous-famille, les crambidae, est souvent observable sur les tiges de graminée, avec lesquelles ils se confondent.

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Crambus perlella

 

 

27 colotois pennaria 11 on salixColotois pennaria

 

Geometridae : ainsi appelés parce que leurs chenilles (qui n’ont que deux paires de fausses pattes) se déplacent en ramenant leur extrémité arrière vers l’avant, puis se détendent à nouveau, comme si elles « arpentaient le terrain ».Les imagos ont des ailes plus larges que longues, généralement déployées latéralement au repos, leur donnant un aspect triangulaire (on reste dans la géométrie).

 

27 biston betularia 4Biston betularia